les Bleus entre crainte et envie avant de retrouver le Stade de l’Aviva
Le XV de France a gagné lors de son dernier déplacement, il y a deux ans, devant des tribunes vides. L’Irlande est depuis invaincue sur son terrain. L’expérience en 2019 de l’Aviva Stadium plein est un souvenir plus douloureux pour les Bleus qui, pour autant, aiment cette ambiance qu’ils affronteront ce samedi (15h15) à Dublin pour leur 2eme match dans le Tournoi des VI Nations.
14 février 2021, alors que l’Europe commence à compter les vagues de Covid qui s’enchaînent, les restrictions mettent de nouveau sous cloche le sport professionnel sur une grande partie du continent. Dans un stade Aviva qui sonne creux, à huis clos, le XV de France s’impose (13-15), et depuis, personne n’a battu le Trèfle sur sa pelouse. Samedi après-midi, ce n’est pas seulement la première nation mondiale que les Bleus affrontent, mais 50.000 supporters irlandais, avec pour leur répondre près de 1.500 Français.
Alldritt : « Le genre de match qu’on veut jouer »
L’évocation de ce choc au sommet inspire Fabien Galthié : « Nous n’avons pas encore joué à l’Aviva Stadium dans ces conditions-là, dans un stade plein. Alors comme je dis souvent aux joueurs : « bienvenue dans le sublime, le magnifique, qui veut échanger sa place ? » là, il n’y a pas beaucoup de joueurs qui lèvent le doigt… » Grégory Alldritt abonde : « C’est le genre de match qu’on veut jouer », salive la troisième ligne des Bleus. « L’atmosphère va être folle, il y a tous les ingrédients réunis pour que ce soit un match mémorable. On va y aller, prendre beaucoup de plaisir et se donner à 300 %. »
Dés 23 Français sur la feuille de match samedi, un seul déjà fait, cette saison, la (difficile) expérience de l’Aviva Stadium : Gaël Fickou, le trois-quart centre tombé lourdement le mois dernier avec le Racing 92 face au Leinster (36-10) sur la pelouse de Dublin . « Ce stade sublime ses joueurs, cela va être assez dingue. C’est un public de connaisseurs du rugby, c’est ça qui est plaisant avec les Irlandais, ils sont passionnés », affirme Fickou. » Quand on était gamin, on rêvait de jouer ce genre de match, sur une haine d’y être. »
Les Bleus avaient vécu « l’enfer » en 2019
Voilà pour les propositions enthousiastes du côté tricolore. Reste que sept des actuels 23 Bleus ont aussi connu le difficile déplacement à Dublin, lors du VI Nations 2019. Le XV de France ne tutoyait pas les sommets du rugby mondial comme aujourd’hui. Jacques Brunel étrenne pour une dernière fois sa moustache de Twickenham à Rome, en passant par l’Irlande donc. Un match qui tourne à l’humiliation. Les Irlandais mènent 26 à 0, jusqu’à la 77e minute et deux essais d’Huget et Chat en fin de match (26-14 score final). « C’était dur », souffle Gaël Fickou, alors qu’Alldritt acquiesce à ses côtés. « Il y a deux ambiances, celle où tu te fais fracasser comme on a pu le vivre en 2019, où on est passé en enfer », se remémore le Francilien, « et celle où on a gagné, quand il n’y avait pas de supporters, sans cette pression-là qui nous pesait. » Fickou reconnaît que la victoire de 2021 reste un meilleur souvenir, malgré le huis clos qui ne manque pas à personne. Pour Alldritt, le récit diverge un peu : « 2019, c’était mon premier tournoi, donc pour ce match, j’étais complétement ébahi parce que j’adore les ambiances comme celle-là, c’est magique. Il ya juste le protocole qui est un peu long. »
Record d’invincibilité à domicile en vue pour les Irlandais
Le manager général du XV de France Raphaël Ibañez n’a lui connu comme joueur que l’ancien stade de Lansdowne Road, 49.000 places dont près de la moitié debout, détruit pour laisser la place à l’Aviva Stadium inclus en 2010. « Mon premier regard ici est plutôt tourné vers le passé, sur ce stade qui produit à mes yeux un air du bout du monde, avec ce public debout derrière les poteaux, ces chants populaires en permanence », se souvient l’ancien talonneur aux 98 sélections entre 1997 et 2007. « Puis il y a eu la construction de l’Aviva Stadium, plus cosy. Je ne crois pas à cette idée d’enfer. Il n’est peut-être pas très loin, mais le paradis non plus. »
Cet Aviva Stadium, les Bleus savent qu’ils sont capables de le dompter. Même si après les deux victoires de 2011 (en VI Nations et en amical), il a fallu attendre dix ans pour que la France gagne de nouveau à Dublin. Mais pour Fabien Galthié, l’environnement ne sera pas hostile : « Le public irlandais va nous accompagner parce que c’est une chance de jouer dans cette ambiance-là », selon le sélectionneur. « Le public ne sera pas sur le terrain, il ne va pas plaquer, il ne va pas pousser en mêlée. Ce sera quinze hommes contre quinze autres. » Avec un seizième tout de même acquis aux Irlandais, qui ont l’opportunité d’enchaîner une treizième victoire de rang à domicile, pour établir un record d’invincibilité sur leurs terres.