à la découverte de la piste de l’Eclipse, théâtre de la descente hommes
La descente hommes des Championnats du monde de ski alpin de Courchevel-Méribel aura lieu ce dimanche (départ 11h). Seul un skieur complet pourra s’imposer sur la piste de l’Eclipse. Une piste hors normes avec beaucoup de pentes, d’engagement et de challenges.
C’est le joyau de l’organisation des Mondiaux de ski alpin à Courchevel : la piste de l’Eclipse, théâtre ce dimanche de la descente hommes (départ 11h), qui va faire dévaler les skieurs sur près de 1000 mètres de dénivelé entre l’un des sommets de la station savoyarde – pas très loin du col de la Loze, le dernier fleuron du Tour de France – et le site du Praz, cadre des concours de saut et de combiné nordique en 1992. Une piste conçue depuis l’été 2019, avec des terrassements XXL jusqu’aux derniers peaufinages du début 2023, qui a coûté 17 millions d’euros, sans oublier de prendre en compte l’environnement. A elle de rentrer dans l’histoire des pistes mythiques du grand cirque blanc, en sacrant ce dimanche un skieur complet.
Beaucoup de pentes et de challenges
A Courchevel, obligatoirement, quand on crée une piste, elle doit répondre aux normes locales. Comprenez, elle se doit d’être « la plus belle » ! Ainsi, à peine quelques mois après la fin de terrassements rondement menés à la sortie du Covid 19, était-elle dessinée en mars 2021 avec les techniciens du club des sports de la station et les spécialistes de la fédération française de ski, que l’ unanimité se dégage : « Elle va rejoindre les pistes mythiques de Kitzbuhel ou Vail ! » Au moment des séances d’entraînement dans la semaine qui précède la descente du 12 février 2023 ? Xavier Fournier, le boss des descendeurs grand connaisseur des terrains répartis sur la planète pour les fous de vitesse, entend toutefois relativiser : « Certains disent que ça ressemble à Kitzbühel. Mais moi, je pense qu’elle ne ressemble qu’à l’Eclipse , résumé-t-il. Elle est bien dessinée. J’adore le haut, qui dure plus d’une minute. Il y a des beaux sauts qui volent assez loin et le final reste spectaculaire à travers la forêt. »
Le décor est planté pour une future classique de la Coupe du monde, sur le tracé de laquelle l’actuel président de la Fédération internationale de ski, Johan Eliasch, possède un chalet. Marie Marchand-Arvier, vice-championne du monde 2009 de Super G et membre du comité d’organisation, résume cette piste hors normes : « Elle est déjà mythique avec beaucoup de pentes, d’engagement et de challenges. Quand est au départ, en quatre secondes de course, on est à 100km/h avec un saut de 40 mètres en vol. Il faut être puissant, intense et … réveillé ! C’est une course sur 3,2km de long et près de 1000 mètres de dénivelé avec une pente qui peut aller jusqu’à 58 % de déclivité. C’est extrêmement raide et de plus en plus raide en allant dans la forêt. » Saut du Zénith, mur du son, S des arolles, saut des Jockeys, trou noir…. : les points clefs de la piste défilent et égrènent des noms révélateurs de l’intensité de l’endroit : »Ce n’est pas une classique connue de tous les skieurs, explique MMA. Il va y avoir donc un enjeu d’adaptation sur ce secteur. »
Une piste à 17 millions d’euros
Car les athlètes la découvrent depuis peu, les finales de la Coupe du monde organisées en guise de répétition en mars 2022 : il va y avoir à peu près 4 courbes pour toute cette première partie, cela signifie que cela va très droit dans la pente et très vite. Il y a 50 mètres entre les portes, elle est intense en terme de pente et de vitesse ; il faut aller le plus vite possible. C’est la mise en jambe, il faut prendre le rythme dans une descente exigeante en terme de physique. Le tout avant de rentrer dans la forêt. Une piste pour laquelle les organisateurs et la station à travers son service des pistes n’ont pas lésiné sur les moyens en dépensant près de 17 millions d’euros depuis la retenue collinaire du col de la Loze, juste au dessus et tous les terrassements, travaux de pistes et réseaux d’alimentation en eau et en électricité. Mais avec un soin particulier pris vis-à-vis des enjeux environnementaux. David Vignon, de la S3V, société des Trois vallées qui exploite le domaine skiable en est le garant.
« Nous avons contourné 5 zones de biodiversité indispensable pour la faune et la flore et nous avons dû faire des coupes dans la forêt ce qui nous a permis de l’entretenir, détaille le technicien. Nous avons découvert les scolytes, des insectes ravageurs. En abattant une partie, nous avons régénéré l’ensemble du domaine tout en finançant les travaux sylvicoles juste à côté de la piste. » La sécurité des randonneurs, l’été a ainsi été amélioré. Dès les études de qualifiés pour les besoins de la candidature obtenues en 2107 – et obtenues en mai 2018 – les associations de protection de la nature ont été associées aux travaux : « Ce cahier des charges est le nôtre pour tous les autres travaux de piste de la S3V et nous l’avons particulièrement utilisé dans le cadre de la création de cette piste car la préservation du territoire et notre lieu de vie, ajoute David Vignon. Nous y sommes viscéralement attachés. »
« Un pur plaisir »
Et même un secteur de la piste souligne cet aspect environnemental : le mur de la Bux, pour une espèce protégée, la Boxbonia Veridis, une mousse capitale pour l’équilibre de la forêt : « Nous avons détruit une colonie de cette mousse et nous l « Nous avons déplacé une grande partie juste à côté. Nous avons aussi créé des maisons pour la Bux. Nous avons mis du bois mort à terre pour faire prospérer cet écosystème de développement de cette mousse qui va aussi aider à la régénération de la forêt. C ‘est un travail avec l’ONF et un comité de pilotage au sein de notre société où participer les associations. Nous discutons de ce qui nous faisons pour améliorer la connaissance afin de ne pas faire n’importe quoi dans le respect de l’environnement . » Mais pourquoi l’Eclipse, alors que « l’historique » dénomination de la piste, l’une des premières de la station créée à la sortie de la Seconde Guerre mondiale par le département de la Savoie, est « piste des Jockeys » ?
Parce que sur la fin, en entrant dans la forêt, ce n’est que succession de moments d’ombres et de lumières : « L’éclipse, c’est ce passage du clair au foncé, comme quand vous êtes en voiture et que vous entrez dans un tunnel, image Marie Marchand Arvier. C’est pour cela aussi qu’un secteur s’appelle ‘Le trou noir’. Il ya un temps d’adaptation des yeux à l’ombre. Ce temps de recul est perturbant . Il faudra anticiper cette absence de lumière pour rester sur ce fameux fil du rasoir. » Une habitude d’alternance que les athlètes semblent avoir apprivoisés comme le dit, à l’issue du dernier entraînement de vendredi, le skieur français Adrien Théaux : « C’est une magnifique piste, travaillée de façon incroyable par la station. Un pur plaisir . Il y a beaucoup de mouvements de terrains, des sauts. Les entrées dans l’ombre, il faut bien ouvrir les yeux ! Il faut bien gérer pour prévenir les virages. Nous y voyons pas grand-chose dans ces instants, mais il faut avoir confiance. » Quant à la confiance dans la possibilité pour les Bleus d’aller chercher une médaille, elle repose sur les épaules et les spatules de Johan Claryrécemment monté sur le podium de la « mythique » Streif à Kitzbühel.